Electron
- 07 avril 07- Usine @ Genève
La
Suisse a beau être un petit pays, elle sait comment s'y prendre
pour proposer un festival de grande envergure sur 4 jours avec
un line up de folie : Ellen Allien, Mr Oizo, Scratch Massive,
Blackstrobe, Vitalic, François K, Boys Noize, John Lord Fonda,
Anthony Rother, Terence Fixmer, Mad Professor, Trentemoeller,
69 DB, Crystal Distortion, Jun-X, Apparat, ParOne, Amon Tobin,
Grooverider, Tiefshwarz… C'est pas moins de 115 artistes qui
ont fait résonner les BPM dans 7 salles différentes : le Zoo
et le Cab (site de l'Usine), le Kbar et l'Arabesque (site d'Artemis),
le Bâtiment des Forces Motrices (BFM), le Moulin à Danses et
le Crem ! Cap le samedi 7 avril pour découvrir le festival genevois.
La première impression ressentie à l'arrivée sur le site est…
Un sentiment d'organisation un peu bordélique : pas de parkings
réservés pour le festival (ami de la marche et du stationnement
à l'arrache, bonsoir !), des billetteries différenciés (vente
sur place, pré-vente, presse… De quoi vous faire
tourner la tête à trouver le bon guichet !), des salles à capacité
limitée (à 1h, une foule hurlait devant le BFM faute de ne pouvoir
rentrer) et des lieux un peu trop espacés les uns des autres
(on ne verra pas la couleur de 4 salles éloignées de l'Usine).
Mais
ne soyons pas aigri car si on aime râler, c'est bien aussi parce
qu'on est français ! Une attention particulière a été faite
à la vidéo avec des écrans géants dans toutes les salles et
une proximité appréciable entre les artistes en scène et le
public (si, si, on pouvait presque sentir la transpiration des
artistes tellement qu'on était proche !). Le BFM reste la salle
la plus réussie au niveau son et lumières. Autre initiative
appréciable avec la présence d'un service de prévention (Nuits
Blanches avec ses hôtesses fort
sympathiques)
et d'eau froide dans les toilettes : une belle preuve que les
organisateurs se soucient de la santé des participants. On ne
peut pas manquer aussi d'être sous le charme des Suissesses
et d'afficher un sourire en voyant un brassage de population
vêtue de toutes les couleurs et ouverte à différents styles
musicaux : quel bonheur de pouvoir entendre du Hip-Hop dans
un festival électronique !
A
1h, le Zoo est en phase hystérique sur la techno allemande d'Apparat.
Ce jeune prodige a su nous distiller un live énergétique, rempli
de sons breakbeat façon Bpitch Control avec une touche de minimal
et de mélancolie : une prestation finement menée jouant avec
les émotions du public jusqu'à le faire hurler à chaque montée.
Le temps de reprendre nos esprits en prenant un peu l'air et
direction le Cab pour un turntablism de folie : Scratch Pervers
! Une impression de gangsta se dégage de l'atmosphère avec une
entrée en matière qui nous a laissé dubitatif. Et d'un coup
la vague old school du hip-hop nous a pris au trip avec du Dr
Dre, Snoop Dog et autres tubes façon " assassins de la police,
houp, houp ! ". Un truc de ouf avec une prestation à deux scratch
et un mec construisant sa rythmique manuellement à une vitesse
allant crescendo et frôlant les 180 BPM du Hardcore ! Un vrai
show et une foule hystérique chantant les hymnes eighties et
applaudissant ce spectacle de qualité.
Un
grand bol d'air frais en écoutant sur la place des volontaires
le son d'un djambé : parfaite ambiance zen de chill-out régnant
à l'extérieur. On retourne au Zoo faute de ne pouvoir rentrer
dans le BFM. On y retrouve un PadaOne complètement à bloc, dans
un live-top rappelant étrangement les premier scuds de Dima.
Ca monte haut, ça titille les neurones et ça fait du bien, même
si la structure des morceaux est un peu toujours pareille et
que la syncope de la rythmique casse parfois le dancefloor en
pleine montée. Alors que ParaOne est en pleine transe,
Surkin se met en place : chouette, un nouveau live en perspective
! Mais à notre grande déception, on assiste à un mix… de MP3
! Ca laisse une drôle de sensation d'amertume en voyant ce pseudo
mix qui interroge sur la prestation même de l'artiste : est-il
vraiment en train de mixer en direct ? Peut-on encore parler
de mix lorsqu'un logiciel se charge de caler les morceaux ?
N'est-on pas en train de réduire le travail du DJ à celui d'un
gestionnaire des filtres ? Le public semble ne pas trop s'en
soucier mais notre âme de vieux de la vieille, adepte de la
prestation vinyle, nous pousse loin à l'extérieur de la salle.
L'accès
à la BFM est enfin possible. On file écouter la fin du set d'Amon
Tobin : la foule bat son plein, on en prend plein les yeux et
les oreilles et on a vraiment le sentiment que c'est l'artiste
phare de ce festival. Le look British fait son effet avec un
béret un tee-shirt à l'effigie de la grande faucheuse. Amon
Tobin nous fait voyager dans son univers enrichi de Drum'n'Bass,
Trip-Hop, Ragga et Jazz ! C'est beau, ça fait percher et ça
permet de redécouvrir tout le catalogue de Ninja Tunes. Prestation
CD sur des platines Nuloop arborant un pseudo plateau vinyle,
des petits sourires de l'artiste découchés en direction des
danseurs… Rien à redire sur la qualité du prodige anglais. La
fin de son set laisse place à Radioactive Man, artiste à la
patte de velours en matière de mix bigarrés : breakbeat, minimal
et techno
s'entrechoquent
en parfaite symbiose et pour notre plus grand plaisir. Une petite
note négative encore une fois pour l'organisation qui plaçait
cet artiste dans l'ombre d'Amon Tobin : Radioactive Man devait
se contenter d'une petite scène sur la bas coté à la différence
de la scène monstrueuse pour Amon Tobin !
La
fatigue commence à se faire sentir… La fraîcheur du petit matin
parcoure nos échines et nous presse vers la voiture, direction
Annecy/Grenoble. Nous restons sur une impression teintée concernant
le bilan de ce festival. Son défaut reste fatalement son organisation
un peu négligée devant la grandeur de l'évènement : moins de
salles, moins d'artistes permettraient peut-être d'avoir de
plus gros dancefloors et d'éviter que le public se perde dans
les méandres des flux entre les différentes salles. Sa qualité
reste les visuels et la très bonne qualité du son. On se questionne
sur une participation à l'Elektron 5… Un plateau alléchant ne
suffit pas à faire la qualité d'un festival.
Anthony Beauchet (avec
la collaboration de Cyrille Renaud )